L’automne, ou le mouvement d’intériorisation

L’automne, ou le mouvement d’intériorisation

Les mouvements énergétiques des saisons

Dans la tradition chinoise, chaque saison est associée à un type d’énergie particulière qu’il s’agit de suivre, et surtout de vivre, afin d’en puiser la force et nourrir ainsi son corps tout au long de l’année. C’est avant tout parce que nous ne suivons pas les cycles naturels des saisons que la santé se détériore, que les déséquilibres énergétiques et les maladies apparaissent. Telle est la règle sur laquelle se base toute l’énergétique chinoise.

L’automne, ou le mouvement d’intériorisation

Dans la tradition Chinoise, les saisons, comme toutes choses, peuvent se saisir au travers des notions de Yin et de Yang. Ainsi, l’Automne manifeste le déclin du Yang et le renouveau du Yin. Mais le mouvement énergétique propre à l’Automne se saisit peut-être mieux encore par les caractéristiques Yang et Yin prises dans leur qualité dynamique : le Yang est expansif, centrifuge, une énergie qui va du centre vers l’extérieur, de l’individu vers le monde. Le Yin, à l’inverse, concentre et possède une dynamique centripète allant de l’extérieur vers le centre, du monde vers l’individu. Autrement dit, la saison automnale impliquant la montée en puissance du Yin consacre le mouvement de l’externe vers l’interne : c’est le mouvement d’intériorisation.

Ralentir, premier mouvement vers l’intériorisation

Comme nous le soulignions dans notre article sur l’été, considérer la période estivale comme une période de repos est particulièrement injustifié du point de vue énergétique. L’été est au contraire la saison qui nous pousse à être le plus actif ou active comme nous le montre nos envies de partir ou de sociabilité. L’automne sonne nécessairement la fin de cette phase de mouvement : il s’agit donc en premier lieu de ralentir, ou plus précisément d’accepter de ralentir.

Et cela n’est pas aisé car la rentrée du mois de septembre nous pousse au contraire à la mise en mouvement de nouveaux projets, de s’adapter à de nouvelles situations professionnelles ou autres. C’est sans doute cette contradiction entre la demande sociale et le tempo énergétique de la saison automnale qui explique en partie cette baisse de régime, ce manque d’énergie et cette fatigue lancinante. Tout se passe comme si nous devions, non seulement trouver l’énergie pour porter ces projets, mais également contrecarrer la tendance au ralentissement que l’on ressent et perçoit dans la nature. 

Sans doute, peu d’entre nous peuvent outrepasser les logiques sociales et ralentir toutes leurs activités au moment où tout le monde « rentre ». Nous pouvons cependant trouver des temps où consciemment nous cherchons à ralentir, à prendre notre temps, à s’accorder et à renouer avec le rythme naturel. La marche nous semble une voie privilégiée pour ce faire. Non pas la marche active et volontaire des randonnées montagnardes de l’été. Non, plutôt une marche lente et réceptive dans les forêts ou les parcs,  magnifiques en cette saison.

Une marche où vous prenez le temps – ou plus précisément, vous laissez le temps vous imposer son rythme – une marche durant laquelle vous laissez les sensations (odeurs, couleurs, sensation de fraîcheur et d’humidité, la brise légère sur votre visage) vous affecter, vous nourrir en conscience. Réservez-vous un temps de marche durant les week-end. Vos Poumons, organes associés à l’Automne, se régaleront et se renforceront au contact de cet air pur et frais des forêts.

Une marche où vous laissez votre esprit lui aussi suivre son propre cours. L’automne, saison où traditionnellement l’on engrange et on compte le foin et autres céréales en prévision de l’hiver à venir, est le temps des bilans, du retour sur investissement si l’on peut dire. La marche automnale tendra naturellement vers cet état d’esprit et vers ces pensées : qu’ai-je obtenu des efforts consentis, des projets mis en route au printemps ? Quelles leçons retenir de telle expérience passée ? Prenez le temps de faire advenir ces bilans lors de ces marches automnales et d’en accepter les leçons…

Le retour au corps : second mouvement vers l’intériorité

Nous avons vu que la naissance du Yin qui caractérise l’Automne peut être aussi vu comme le mouvement allant de l’Externe vers l’Interne, du monde vers l’individu. Ce mouvement intériorisation nous amène ainsi à un retour vers le corps de l’individu, vers notre corps. C’est sans doute la seconde étape qu’il faut entamer pour vivre cette saison automnale. Retourner vers son corps, d’accord, mais comment ? Cela peut prendre plusieurs formes différentes. Les massages comme le Shiatsu, mais aussi sous ses autres formes, nous ramènent évidemment vers notre propre corps. Les auto-massages seront également les bienvenues, comme celui-ci : Petit Do-In du haut du dos.

Le toucher est le sens qu’il faut privilégier et développer en cette saison. Et ce n’est pas un hasard si la peau est considérée comme le troisième Poumon, qui, comme nous le soulignons plus haut, est l’organe rattaché à la saison automnale. Notre peau, là où s’exerce et se ressent le toucher, est la frontière qui définit notre enveloppe corporelle. La conscience de cette frontière par le toucher facilite cette corporéité.

Nettoyer son corps est le second moyen qui permet de renouer avec la dimension corporelle de notre être. Nos conditions de vies (environnement urbain, alimentation, stress, gestion parfois difficiles des émotions, etc.) entraînent une pollution de notre organisme  ; pollution dont il faut s’alléger pour éviter un encrassage généralisé et un terrain propice à moyen et long terme aux maladies chroniques et autres cancers. Le corps possède ainsi des organes dont la fonction est de stocker ces déchets et pollution : les émonctoires. Les grands émonctoires du corps sont le foie, les poumons, le gros intestin , la peau et les reins.

Nous avons vu comment les promenades renforceront les Poumons en cette saison. Par cela, elles favorisent leur capacité « émonctoire ». Énergétiquement, le Foie est au repos à l’automne, on préférera donc le nettoyer lorsqu’il se «réveillera » au tout début du printemps (début février). Le Gros Intestin est le second organe qui est lié, avec les Poumons, à la saison automnale. C’est donc sur lui que nous pouvons aussi concentrer notre attention.

Le Dr Kousmine a montré comment le Gros Intestin est, avec le Foie, le lieu privilégié où se stockent les déchets de notre corps. L’hygiène intestinale, c’est-à-dire préserver un Gros Intestin propre, est ainsi un des piliers de sa méthode. Les lavements intestinaux, pratiques traditionnelles aujourd’hui oublié, sont ainsi bienvenues. Il s’agit de nettoyer par l’injection d’eau dans le colon, les dépôts qui se forment le long de l’intestin (principalement le gros intestin) qui créent un milieu pathogène et inflammatoire provoquant notamment douleurs du colon, selles irrégulières, gaz et plus généralement à l’encrassage généralisé du corps. Une fiche technique est téléchargeable ici pour plus d’informations.Une cure d’Argile verte peut être aussi un moyen de désintoxiquer cette zone et d’en apaiser et  réparer les tissus inflammés.

Enfin, une autre manière de retrouver son corps est une attention particulière à son alimentation. En cette saison, il est bénéfique de consommer les légumes de saisons notamment de couleur blanche (la couleur associée en médecine chinoise à l’Autonome ) et de saveur piquante. Vous retrouvez dans notre article consacré à la diététique de l’Automne avec la liste des aliments à privilégier….

Le retour à soi : développer son intériorité

Troisième et dernière phase dans ce cheminement automnale pourrait s’intituler : développer son intériorité. C’est sans doute un travail qui suscite le plus de réticence ou d’interrogation pour une partie d’entre nous. Notre société en favorisant le mouvement, la vitesse, la vie professionnelle et familiale, l’intellect plus que le corps valorise ou sur-valorise même l’énergie Yang, Nous sommes construit dans cette culture portée vers le monde, tout ce qui est extérieur à nous, et bien peu nourrit à aller vers notre intérieur et à le connaître.

Cette difficulté à aller vers soi s’illustre à travers une question bien concrète : combien d’entre nous, hormis ceux et celles qui en font leur profession, connaissent la localisation de nos organe internes ? Le foie est-il à gauche ou à droite ? A quoi sert-il ? Où s’arrête l’intestin grêle et où commence le gros intestin ? Bien sur, ce que nous appelons l’intériorité ne consiste pas à connaître la localisation de nos organes internes. Toutefois, ces simples questions nous indiquent l’état de nos connaissances sur ce qui constituent notre intérieur, même physique.

L’intériorité a parfois mauvaise presse car, dans notre société laïque, elle renvoie à la tradition religieuse comme étant un état pouvant se rattacher à la prière ou alors comme étant opposée au principe moral altruiste : se tourner vers soi serait se détourner de l’autre, bref, une posture tendant vers l’égoïsme. C’est souvent la première réaction que j’entends lorsque j’évoque cette notion lors de mes séances de Shiatsu. Mais cette opposition n’a pas lieu d’être. Prendre soin de soi est la condition pour être, dans un second temps, véritablement à l’écoute de l’autre. C’en est même la condition fondamentale…

On peut définir l’Intériorité comme la capacité à être à l’écoute de sa vie intérieure, de ses besoins, de ses d’émotions, de ses intuitions et de ses aspirations profondes. C’est à être à l’écoute de sa voie intérieure, de sa conscience. C’est aussi, comme on le dit plus volontiers, prendre soin de son jardin secret.

Être à l’écoute requiert un premier pas souvent difficile : faire le silence en soi. Faire le silence face à nos pensées qui nous assaillent dès que l’on se pose. Car assurément, être à l’écoute de sa vie intérieure c’est d’abord réussir à se détourner du bavardage incessant de notre mental, à ces jugements sur tout et n’importe quoi souvent portés par la peur et l’inquiétude, à sa volonté d’organiser, de prévoir, de contrôler. Se détacher de ce verbiage mental pour descendre dans une zone plus basse, plus intérieure, dans son ventre, dans le Hara dirions-nous en suivant la tradition japonaise.

Et c’est le but premier des pratiques de méditation : prendre de la distance avec l’agitation mentale en focalisant son attention de manière bienveillante soit sur sa respiration ou sur ses sensations corporelles (son, couleur, toucher, etc.) pour que le silence s’installe peu à peu. Mais jamais pour très longtemps. Constatez, sans juger, lorsque vous êtes repartis dans ses pensées. Portez à nouveau son attention sur sa respiration, sur les sensations de son hara, ou à toutes autres sensations corporelles. Votre esprit repart ? Rien de plus naturel, ne vous focalisez pas dessus… Recommencez encore et toujours avec toujours plus de bienveillance envers vous… Vous finirez par sentir que vous observez vos pensées comme l’on regarde passer les nuages dans le ciel. Vous y êtes…L’agitation mentale s’éloigne, le silence advient… Ecoutez, savourez, toujours avec bienveillance…

Faire baisser l’agitation mentale pour atteindre des moments parfois furtifs de silence où l’écoute de soi devient possible, l’écoute de ce qui remonte du plus profond de soi, une écoute au travers de laquelle se forment des compréhensions de soi – mais aussi du monde extérieur-, de ses besoins véritables, sous un mode plus intuitif, plus profond, plus ancré, plus subtil, plus vrai en quelque sorte. Rentrer en contact avec son Être intérieur comme le disent notamment les maître Zen Japonais.

Être en lien avec son intériorité, c’est évidemment quelque chose qui s’apprend et se construit peu à peu. C’est une découverte insoupçonnée pour certains et certaines, un monde inconnu à explorer. Quelque chose avec lequel on apprend à cheminer, que l’on apprend à faire exister peu à peu au quotidien ou lors de pauses régulières où l’on « fait le point ». Accessoirement si l’on ose dire, c’est aussi une aide très précieuse pour lutter contre l’anxiété, la dépression, les émotions qui nous envahissent ou encore les états inflammatoires… Un temps où l’on prend rendez-vous avec soi-même, un temps où l’on prend soin de soi…

Il existe de multiples techniques de méditation. Voici une petite fiche technique simple pour vous y mettre : Conseils et techniques de base pour la méditation Vous pouvez également vous référer à une lecture abondante sur le sujet, notamment autour de la méditation de pleine conscience, issu du bouddhisme. En voici quelques unes que j’affectionne particulièrement:

  • Méditer jour après jour de Christophe André
  • Entrer en amitié avec soi-même de Pema Chodron
  • Le pouvoir du moment présent d’Eckhart Tolle

Bonne saison automnale, et n’hésitez pas à me faire part de vos retours…



10 thoughts on “L’automne, ou le mouvement d’intériorisation”

  • Merci pour vos articles, éclairages, et simplicité.

    Petite précision technique : le lien utilisé dans votre mail n’arrive pas sur la page où figure le texte sur l’automne, mais tente (en vain) d’accéder à un brouillon.
    Simple question de recalage dans le tangible ! 🙂

    Fraternellement
    Claire

  • Bonjour,

    Je vous remercie pour toutes ces informations très précieuses.

    Je pratique l’art du mandala, et je me suis rendue compte que lorsque j’en créais, je commençais toujours par le centre pour aller vers la périphérie du cercle. J’ai fait le lien avec ce que vous dites et donc en pratiquant de la sorte, j’ai plutôt tendance à déployer l’énergie Yang. Je vais faire l’expérience maintenant de commencer par le pourtour du cercle pour me diriger vers le centre pour davantage m’intérioriser. Merci pour cette prise de conscience que j’ai pu faire grâce à votre texte.

    Par ailleurs, depuis début août je vis des chutes de tension avec vision perturbée (mon environnement bouge violemment). Ces chutes de tension sont brutales, soudaines et me rappellent trop les vertiges de Ménières. Mais je sais que ce n’en sont pas car au bout de quelques minutes tout est rentré dans l’ordre. Je suis juste un peu fatiguée. Je sens que je manque de tonus et ces chutes de tension sont là pour me le confirmer, je pense. Est-ce en lien avec la saison d’automne. Vous dites qu’il faut ralentir, mais j’ai l’impression que lorsque je me mets au ralenti, c’est à ce moment là que les chutes de tension peuvent apparaître. Tout est question d’équilibre j’imagine. Je souhaiterais volontiers avoir votre point de vue.

    Bien à vous,
    Brigitte

  • Bonjour, J’ai lu avec intérêt les conseils pour la saison d’automne et je me suis employée à les mettre en pratique : longues marches pour m’oxygéner et ralentir l’activité. Ce qui n’est pas forcément évident car je suis enseignante et l’automne est une périodes de grosse activité. En tous les cas, être en harmonie avec la saison déjà dans l’intention m’a fait beaucoup de bien. Je me sens pleine d’énergie. Je vous remercie pour la clarté de vos textes. Pratiquant le gi gong depuis de nombreuses années, je n’avais pas encore vraiment intégré que je devais renforcer l’énergie du poumon à l’automne afin de mieux recharger l’énergie des reins.

    Merci !

  • merci pour ces informations précieuses,
    j’ai beaucoup aimé votre réflexion sur l’intériorité,
    prendre soin de soi en laissant émerger le féminin sacré!

  • Bonjour,
    je vous remercie pour la qualité et la clarté de vos articles. Ils me permettent de continuer à intégrer des notions dans mon étude et ma pratique du shiatsu. Je reviens vers cette étude et votre blog me sera d’une belle aide!
    Belle suite à vous!
    Mina

  • Bonjour,
    Je découvre votre site avec beaucoup de plaisir.
    Simple, agréable, plein d’enseignements… quelle belle découverte !
    Je voudrais mieux comprendre le phénomène des bouffées de chaleur lors de la ménopause et parfois, ce qui est mon cas, bien longtemps après… Que faire d’un point de vue diététique notamment ?
    Merci.

  • Merci pour votre article,
    je travaille moi même le lien entre les plantes occidentales, la MTC et les saisons.
    Je suis face à une question ambiguë du réel mouvement du In et du Yang car à l’origine il est dit que:
    Le yang est une force de direction centripètes qui tend à la contraction et la rétraction ( la vieillesse est le yang grandissant: avec ses rétractions). Ce sont les forces de contractions et de physicallisations. La voie de la matérialisation. La manifestation du yang quand à elle est de nature centrifuge mais son mouvement centripète. Cela s’explique par l’incarnation de la lumière par la photosynthèse en été saison yang maximal où ce feu lumière par le mouvement du yang va descendre dans la matière aussi par l’énergie alimentaire.
    Le Yin la force de direction centrifuge qui tend à la dilatation et l’expension (l’embryologie maximum de in est une vaste expension fait encore partie du ciel antérieur).
    Ce sont les forces de la déphysicallisation et de la spiritualisation. La manifestation du In est centripète mais son mouvement est centrifuge.

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